Andrew Campbell
Tous les restaurants ne servent pas de viande de bison, mais je vois de plus en plus de menus où on me propose le burger de bison comme alternative au burger de bœuf. Cette popularité grandissante incite de plus en plus d’agriculteurs à faire l’élevage du bison, plus particulièrement dans les prairies de l’Alberta et de la Saskatchewan. Au cours de ma recherche pour trouver un éleveur, Roger s’est imposé comme étant le parfait candidat. Le chapeau et la monture d’équitation en bison qu’il transporte dans son camion sont des signes que pour Roger et sa famille, l’élevage du bison est une réelle passion. Suivez-moi en cette froide matinée albertaine, à la découverte d’un ranch d’élevage du bison des plaines, une espèce indigène de l’Amérique du Nord.
Nous sommes dans la magnifique province de l’Alberta pour visiter avec Roger son ranch de bisons. J’avoue que ce ranch est un peu différent des fermes et des ranchs que j’ai l’habitude de visiter. Parlez-moi un peu du bison des plaines, Roger.
Le bison est un animal indigène de l’Amérique du Nord et il est parfaitement adapté au climat canadien. Les bisons s’épanouissent bien ici.
La population de bisons a diminué à la fin des années 1800 et en 1899, il n’en restait que 1000. Grâce à des efforts concertés, nous avons réussi à faire grimper le nombre de bisons à 400 000 en Amérique du Nord. En 2017, il y avait 975 éleveurs de bisons au Canada pour 145 000 têtes. Il y a plusieurs fermes de bisons dans la région et la demande des consommateurs est en croissance. On sent beaucoup d’enthousiasme autour de l’industrie du bison.
Une idée fausse très répandue est que le bison est un animal énorme, mais ce n’est pas le cas. Le bison est un peu plus petit, il mange moins et grandit plus lentement qu’un bovin de boucherie.
Est-ce que l’élevage du bison est principalement destiné à la production de viande ? Comment est la viande de bison si on la compare à d’autres viandes rouges sur le marché ?
La viande de bison est une viande rouge maigre, semblable à la viande de bœuf. C’est une viande très tendre, riche, rassasiante et sa saveur est légèrement plus fine que celle du bœuf.
Est-ce que le goût de la viande de bison s’apparente à celui d’une viande de gros gibier ?
La viande de bison n’a pas un goût de gibier aussi prononcé qu’on le croit. Son goût est en fait très similaire à celui du bœuf maigre ou du bœuf nourri à l’herbe.
Je ne peux pas, par exemple, me rendre dans une épicerie près de chez moi à London, en Ontario, et y trouver de la viande de bison. Est-ce qu’on en trouve facilement dans l’Ouest ? Où puis-je m’en procurer ?
Je vous conseille un marché de producteurs ou un marché public, où un producteur local pourrait en vendre. Certains magasins d’alimentation font l’effort d’offrir de la viande de bison sur une base régulière et comme la demande continue de grandir, espérons que les Canadiens pourront s’en procurer plus souvent. Les restaurants gastronomiques et les grilladeries (steak house) offrent de plus en plus souvent le burger ou le bifteck de bison. Vous pouvez également commander de la viande de bison en ligne et la recevoir à votre porte. Voici le lien pour consulter la page du site de l’association Canadian Bison qui contient une liste des points de vente et des magasins en ligne où se procurer de la viande de bison (en anglais).
À quoi ressemble une journée ou une saison typique à la ferme, et les soins que vous apportez aux bisons ?
En ce moment, c’est l’hiver, alors ici les bisons broutent des ballots de maïs et de foin. Pour nourrir notre troupeau de 120 bisons, nous coupons les cordes de 50 ballots et nous laissons les bêtes paître comme ça sur trois ou quatre semaines, puis nous recommençons.
Même si nous ne nourrissons pas les animaux tous les jours, nous les examinons quotidiennement pour nous assurer qu’ils se nourrissent bien, qu’ils sont en santé et que tout se passe bien dans l’enclos.
Pendant les mois d’été, nous coupons le foin et nous préparons les ballots en prévision de l’hiver, et nous cultivons la terre. Une fois par année, nous rassemblons les bisons pour la période de sevrage (séparation des femelles et des jeunes veaux). Après le sevrage, les jeunes bisons sont logés ailleurs, selon qu’ils seront engraissés pour le marché ou élevés en tant que bisons reproducteurs afin d’agrandir le troupeau.
De quel type d’équipement agricole avez-vous besoin pour l’élevage des bisons ?
Le système de gestion du troupeau a été conçu à l’origine pour les wapitis, mais il convient bien aussi aux bisons. Nous avons une série de panneaux de métal de 8 pieds de hauteur à inserts de bois qui réduisent le bruit et aident ainsi à maintenir le calme dans le troupeau. Nous faisons entrer les bisons par différents couloirs. Avec les bisons, il faut prévoir quelques options, car ils sont pas mal intelligents. S’ils décident de ne pas aller d’un côté, ils iront peut-être de l’autre ! Nous les laissons faire un tour, mais éventuellement, nous les dirigeons au bon endroit, que ce soit vers un couloir de contention, une balance ou une zone de triage.
C’est important dans l’élevage des bisons d’avoir le bon équipement. En bon Canadiens, nous avons inventé un outil de triage fait d’un panneau ou d’une bâche accrochée au bout d’un bâton de hockey ! Il n’y a pas d’animaux ici aujourd’hui, parce que nous utilisons le système de manutention seulement une fois par année. Nous dirigeons les bisons en agitant le bâton de triage devant leurs yeux ou en les touchant par derrière – sans les frapper, évidemment. Vous voulez que les animaux restent calmes pendant la manutention. L’outil le plus important dans l’élevage des bisons, ce sont les jumelles qui nous permettent de les surveiller au loin. Le deuxième outil, c’est le bâton de triage fait maison, qui sert une fois par année pour trier les bisons.
Il y a une raison pour laquelle il doit y avoir une barrière et de l’acier entre moi et les bisons. Vous ne pouvez pas entrer dans l’enclos, parce qu’ils peuvent vous charger. À moins que vous souhaitiez écourter votre carrière d’éleveur, vous restez en dehors de l’enclos. Si vous voulez faire ça longtemps, restez à l’extérieur de l’enclos et utilisez un système de manutention.
Je vois un couloir de contention ici. Pouvez-vous me dire à quoi il sert dans le cas des bisons ?
Le couloir de contention fait partie du système de manutention. Il sert à retenir et à stabiliser un animal pour que le fermier puisse l’approcher sans risque de blessure pour lui-même et pour l’animal. Il y a un cornadis à blocage qui retient le bison de manière sécuritaire entre la tête et les épaules, ce qui l’empêche d’avancer ou de reculer.
L’élément important du couloir de contention des bisons, c’est la porte de sécurité qui se trouve devant le cornadis. Elle aide à ralentir les bisons qui entrent en courant dans le couloir : cette porte les ralentit afin que le cornadis puisse se refermer et les retenir derrière les cornes. On peut ensuite poser leur étiquette d’oreille, leur donner un vaccin ou détecter une grossesse. Cela ne prend en général que quelques minutes et dès que c’est fait, on ouvre la porte de sécurité, on relâche le cornadis et le bison est libre. C’est un processus très rapide, mais il faut s’assurer que tout soit prêt et fonctionnel lorsqu’on gère un troupeau de bisons.
Vous devez vraiment penser à votre propre sécurité en travaillant auprès des bisons. Nous sommes dans votre camion et il y a des bisons tout autour, mais nous n’allons pas sortir et nous approcher des bêtes, ou peut-être que oui ?
Non, non, non, vous ne sortez pas ! Ce n’est pas prudent, même si c’est un peu moins dangereux en ce moment que pendant la saison de vêlage, par exemple. Vous ne voulez jamais vous retrouver entre une femelle et son petit. Vous n’aidez pas non plus la femelle à mettre bas, elle y voit elle-même. Si vous intervenez, elle s’occupera de vous avant de s’occuper de son veau ! Alors vous restez à l’écart pendant la saison de vêlage et loin des taureaux pendant la période de reproduction. Ces animaux sont faits pour s’occuper d’eux-mêmes et c’est ce qu’ils font.
Vous dites qu’ils prennent soin d’eux-mêmes : il fait assez froid aujourd’hui en Alberta, mais les bisons sont très calmes. Ils semblent incroyablement confortables, en fait.
Oui, leur manteau d’hiver est très chaud ! Leur pelage épaissit à chaque année : il est conçu pour des températures de moins 30, moins 40, et les bisons aiment le vent. Il n’arrête jamais de souffler, ici, mais les bisons ne se cachent pas dans les arbres pour autant. Ils restent debout sur les collines, face au vent, et apprécient les mois d’hiver.
Je sens que vous êtes entièrement dédié à l’élevage des bisons. Vous transportez une monture d’équitation en bison, un chapeau et des gants en poils de bison, et il y a probablement de la viande de bison dans votre congélateur. L’industrie du bison, c’est votre vie. Pourquoi aimez-vous autant être un éleveur de bisons ?
Le soin des bisons est relativement facile et le rapport avec eux est simple. Ils sont faits pour vivre ici et c’est agréable de s’occuper d’eux. L’industrie du bison se porte très bien, en ce moment, alors l’élevage me permet de faire de bonnes affaires.
Je vous remercie beaucoup, Roger, de m’avoir fait visiter votre exploitation.