par Matt McIntosh
Le Canada cultive beaucoup de maïs, ce qui attire beaucoup de ravageurs spécifiques à cette culture.
Les ravages que peut causer la souche européenne de la pyrale du maïs et d’autres espèces d’insectes parasites peuvent être particulièrement sévères. Lorsque la population de ces insectes est suffisamment élevée, les agriculteurs et agricultrices doivent composer avec des pertes de rendement, des semences de moins bonne qualité, et le risque élevé que le fléau se propage à toute leur culture. Comme pour d’autres insectes nuisibles, le contrôle de la pyrale du maïs repose sur un ensemble d’outils d’intervention, et sur leur combinaison.
L’un de ces outils est la bactérie B.t.
Qu’est-ce que la bactérie B.t. ?
La bactérie Bacillus thuringiensis (B.t.) est présente à l’état naturel partout dans les sols et elle contient des protéines qui agissent comme des insecticides envers plusieurs insectes nuisibles, dont les mouches, les moustiques, les doryphores de la pomme de terre (les fameuses « bibittes à patates ») et les pyrales du maïs. Il existe plusieurs souches de la bactérie B.t., chacune produisant différentes protéines pouvant s’attaquer à des groupes spécifiques d’insectes. La B.t. a été utilisée pendant près d’un siècle par les agriculteurs et les agricultrices, puis commercialisée sous forme d’insecticide à pulvériser des décennies plus tard.
B.t. et génie génétique
La B.t. est encore disponible en formule à pulvériser que les agriculteurs et agricultrices peuvent appliquer manuellement sur leurs cultures pour éliminer certaines espèces d’insectes. Toutefois, les gènes qui permettent à la B.t. de produire des protéines insecticides peuvent être insérés dans la séquence génétique d’une plante, dont le maïs. Un maïs Bt parvient alors à produire les mêmes protéines que la bactérie B.t. afin de se défendre lui-même contre ses attaquants.
Comme la création du maïs Bt implique l’insertion de gènes provenant d’un autre organisme, il est considéré comme un OGM (organisme génétiquement modifié). Au Canada, cela veut dire que son approbation et sa disponibilité continue pour les agriculteurs et agricultrices sont contrôlées par les réglementations de deux instances fédérales, soient le ministère de la Santé du Canada et l’Agence canadienne d’Inspection des aliments.
Un outil parmi bien d’autres
Plusieurs agriculteurs et agricultrices au Canada cultivent des variétés de maïs Bt capables de se défendre contre les pyrales du maïs et la chrysomèle des racines du maïs, un autre insecte dévastateur pour le maïs. Cette approche génétique s’est avérée grandement efficace pendant de nombreuses années.
La sélection naturelle peut toutefois faire pencher la balance. Des populations d’insectes, dont les pyrales du maïs, peuvent développer avec le temps une résistance aux protéines de la bactérie B.t., et c’est ce qui s’est produit. Afin de contrer cette résistance, les agriculteurs et agricultrices doivent souvent combiner les pulvérisations de B.t. à d’autres stratégies, par exemple en plantant différentes variétés de cultures, en pratiquant la rotation des cultures d’une année à l’autre, et en adoptant des pratiques qui favorisent la prolifération d’insectes bénéfiques.
La résistance est un phénomène naturel et inévitable. Certaines portions d’une population d’insectes seront naturellement résistantes par prédisposition génétique. Cette singularité à peine détectable se manifeste très lentement, alors le rythme auquel elle peut s’étendre à toute une population dépend de la « pression de sélection », soit l’intensité des effets qu’exerce le milieu sur les organismes et qui les conduit à évoluer génétiquement au cours des générations.
Bien sûr, un champ cultivé à 100 pour cent de maïs Bt parviendrait sans doute à éradiquer la plupart des insectes ravageurs… sauf les spécimens résistants. Ces derniers produiraient des descendants résistants qui, avec le temps, seraient dominants dans la population. Une pression de sélection aussi élevée doit absolument être évitée par des pratiques de gestion des cultures capables de ralentir la reproduction des populations résistantes. Les agriculteurs et agricultrices doivent avoir à leur disposition différents outils pour prolonger l’efficacité des caractéristiques insecticides empruntées à la bactérie B.t.
C’est donc en ayant recours à un ensemble de méthodes, une approche appelée « lutte antiparasitaire intégrée », que les agriculteurs et agricultrices parviennent à empêcher les insectes nuisibles de développer une résistance aux protéines de la B.t., réduisant ainsi la nécessité de contrôler ces insectes au moyen d’autres insecticides.