par Erin MacGregor
Infodémie (nom fém.) : Surabondance d’informations, parfois justes, parfois non, auxquelles nous sommes exposé·e·s quotidiennement, surtout en ligne. Le volume important de ces informations peut rendre difficile l’extraction de ce qui est vrai et pertinent.
Il ne fait aucun doute que nous vivons une infodémie nutritionnelle.
Qu’il s’agisse d’un titre choc dans un média traditionnel au sujet d’une nouvelle étude, d’un·e créateur·trice de TikTok qui publie des vidéos sur son régime alimentaire ou d’un groupe d’activistes qui multiplie les messages sur les dangers des OGM, lorsqu’il s’agit de nutrition, séparer la réalité de la fiction peut sembler être une tâche impossible.

La première étape pour arrêter la propagation de fausses informations en ligne est d’être en mesure de les repérer. Voici trois façons d’identifier et de naviguer dans la désinformation nutritionnelle en ligne :
1. Attention aux affirmations qui ne sont pas appuyées par des sources
Les communicateurs et communicatrices scientifiques et les expert·e·s dans leur matière fourniront des preuves de ce qu’ils·elles avancent. Si un·e journaliste, un·e chroniqueur·euse ou un·e créateur·trice de contenu fait une déclaration sur la nutrition et la santé, il·elle doit être en mesure d’appuyer ses affirmations par des preuves.
La plupart des plateformes en ligne facilitent l’accès aux sources. Recherchez des hyperliens dans le texte ou une liste d’adresses web à la fin des articles, ou des informations affichées dans les légendes des contenus des médias sociaux qui peuvent vous renvoyer directement à des articles scientifiques ou à des sites web de confiance.
Il est particulièrement important de disposer de preuves adéquates pour les contenus qui présentent de nouvelles preuves ou qui font des affirmations qui vont à l’encontre du consensus actuel.
Par exemple, si un créateur ou une créatrice de contenu affirme qu’un régime strictement carnivore est bon pour la santé, il·elle rejette des décennies de consensus scientifique sur les avantages d’un régime riche en fibres et en végétaux. Étant donné qu’il est rare qu’une étude renverse un consensus scientifique qui perdure depuis longtemps, ce type d’allégation doit présenter des preuves provenant de plusieurs sources de haute qualité.
Lorsque quelqu’un fait une affirmation en racontant une observation personnelle, qu’elle soit basée sur sa propre expérience ou sur l’expérience d’un petit nombre de personnes, cette affirmation ne doit pas être considérée comme une source fiable.
Par exemple : « Ce supplément m’a donné plus d’énergie que jamais ! Mes clients le disent aussi ! »
C’est ce que l’on appelle des preuves anecdotiques, qui ne remplacent pas la collecte et l’évaluation systématiques des données. Les preuves anecdotiques ou les témoignages peuvent accompagner des sources légitimes, mais ils ne doivent jamais être isolés.
Vous ne voyez pas de sources ? N’hésitez pas à les demander ! En attendant, évitez de partager les informations.
2. Soyez sceptique à l’égard des contenus qui vous interpellent sur le plan émotionnel
Si un message vous met en colère ou vous fait peur, méfiez-vous.
Nous savons que les émotions fortes peuvent nuire à notre capacité de réflexion critique et de traitement de l’information. Si vous réagissez de manière émotionnelle à quelque chose que vous voyez en ligne, prenez le temps de réfléchir au contenu lui-même.
Les études sur la nutrition sont notoirement simplifiées à l’extrême dans les titres des journaux, qui sont souvent rédigés pour susciter la peur en guise d’appât à clics. Un titre tel que « Une seule portion de (n’importe quel aliment) peut augmenter le risque de cancer » est presque certainement trompeur par rapport l’étude à laquelle il se réfère.
Abordez les titres reliés aux études en nutrition avec scepticisme. Comprenez que la science de la nutrition est complexe et qu’en réalité, elle ne glorifie ou ne dénigre presque jamais unilatéralement un aliment ou un nutriment en particulier.
Les messages fondés sur la peur sont également une tactique courante parmi les créateurs et créatrices de contenu sur les médias sociaux. Les affirmations voulant que certains ingrédients alimentaires soient « toxiques » ou « dangereux » sont devenues très populaires. Les créateur·trice·s qui font ce type d’allégations peuvent en tirer plusieurs avantages. Non seulement les messages fondés sur la peur attirent des adeptes, mais ils peuvent aussi contribuer à la commercialisation des produits ou des services d’un·e créateur·trice.
Face à des messages fondés sur la peur, posez-vous la question suivante : « En quoi cette affirmation profite-t-elle au créateur ou à la créatrice de contenu ? »

3. Méfiez-vous des tactiques courantes de désinformation en matière de nutrition
Les tactiques suivantes sont des exemples d’arguments trompeurs ou faux qui peuvent sembler plus forts qu’ils ne le sont en réalité parce qu’ils sont persuasifs.
Référence à la nature
Il s’agit d’un argument qui suppose qu’une chose est « bonne » tant qu’elle se produit ou existe dans la nature. Il s’agit d’une tactique couramment utilisée pour diffuser des informations erronées sur l’alimentation et la nutrition. Il est important de rappeler que de nombreux ingrédients synthétiques ont rendu notre alimentation plus sûre (conservateurs) et plus nutritive (enrichissement en vitamines), tandis que des éléments naturels, tels que des bactéries comme la listeria, peuvent être mortels. En fait, ce n’est pas parce qu’un produit est naturel qu’il est plus sûr ou plus nutritif.
Fausse dichotomie
Cette tactique consiste à présenter un argument comme étant blanc ou noir, alors qu’en réalité, la plupart des sciences de la nutrition présentent de nombreuses nuances. Méfiez-vous des affirmations selon lesquelles un seul aliment ou nutriment est « bon » ou « mauvais ». À moins qu’ils soient associés à des allergies alimentaires, les aliments ne devraient pas être catégorisés de cette façon.
Corrélation n’est pas synonyme de causalité
Il s’agit d’une tactique qui soutient à tort que lorsque des observations sont corrélées, ou observées ensemble, l’une est à l’origine de l’autre.
Par exemple, si l’augmentation des ventes d’aliments sans gluten est observée au même rythme et au même moment que l’augmentation des attaques de requins, il ne serait pas logique de conclure que les aliments sans gluten sont à l’origine des attaques de requins.
Lorsqu’on affirme qu’une consommation accrue d’un aliment ou d’un nutriment spécifique « cause » un problème de santé, il faut en douter. Les relations de cause à effet entre la nutrition et la santé sont difficiles à prouver. Elles nécessitent en effet une quantité importante de données et d’analyses statistiques pour constituer un argument solide.
En conclusion
Les fausses informations sont omniprésentes. Qu’il s’agisse de nutrition, de salubrité alimentaire ou d’informations générales sur la santé, il est important de ne pas les propager. Prendre le temps de réfléchir à ces signaux d’alerte avant de transmettre un contenu à des amis, à la famille ou par le biais des médias sociaux est un pas dans la bonne direction pour aider à gérer l’infodémie d’aujourd’hui.
Sources :
How to Spot Fake News | FactCheck.org | Publié le 18 novembre 2016 (en anglais)
How to Spot Fake News | International Federation of Library Associations and Institutions (en anglais)
Misinformer Tactic: Make you angry | ScienceUpFirst (en anglais)
Misinformer Tactic: False Dichotomy | ScienceUpFirst | Publié le 21 décembre 2021 (en anglais)
Can You Trust That Study? – One Study Rarely Flips the Script | ScienceUpFirst (en anglais)
Resources :
Mythes et désinformation nutritionnelle |Dossier Ici Radio-Canada/Mordu
Perte de poids : Mettre fin à la désinformation sur les réseaux sociaux | La Presse | Publié le 24 janvier 2022