L’élevage des insectes au Canada

par Matt McIntosh

À table comme à la ferme, les insectes se rendent utiles.

Les bestioles ont conquis chaque recoin du monde. Ces dernières années, les insectes comestibles que sont le grillon et le vers de farine ont grimpé en popularité au Canada, en tant que produits en soi et qu’ingrédients ou produits alimentaires, comme les protéines en poudre. Les insectes sont les bienvenus dans l’alimentation humaine ainsi que dans toute une variété de produits, dont les aliments pour animaux domestiques et pour le bétail.

Afin d’approvisionner les entreprises de transformation et de garnir les étalages, la production d’insectes comestibles doit être continue. L’élevage à grande échelle de ces précieuses petites créatures, l’entomoculture, est devenu une nécessité.

Formidables insectes

Les insectes sont utiles — ou ont le potentiel de l’être — dans

•  l’alimentation humaine
• l’alimentation du bétail
•  l’alimentation des animaux domestiques
•  la fabrication de produits non alimentaires (les cosmétiques, par exemple).

Une ferme destinée à l’élevage des poulets ne ressemble pas à une ferme d’élevage de moutons, et cela s’avère tout aussi vrai dans le cas des insectes. Chaque ferme est conçue pour répondre aux besoins uniques à chaque espèce d’insecte.

Une ferme de grillons, par exemple, peut contenir des « condos pour grillons », de toutes petites tours qui servent à les abriter dans la grange. C’est ce système qu’a choisi l’entreprise ontarienne Entomo Farms, qui fait l’élevage des grillons pour la production de collations et de protéines en poudre.

Il faut toutefois une installation complètement différente pour faire l’élevage de mouches. Enterra, la plus grande entreprise d’élevage d’insectes au Canada, fait l’élevage de la mouche soldat noire dans une installation verticale de type agricole.

Comme nous l’explique Bruce Jowett, son directeur du marketing, l’emplacement de l’entreprise à Calgary consacre sous un même toit l’équivalent de trois terrains de football à l’élevage de la mouche soldat noire. En tout temps, trois milliards de mouches à différents stades de croissance pullulent dans cette structure.

Pourquoi faire l’élevage de la mouche soldat noire ?

Enterra a débuté cette activité en 2008 et a choisi la mouche soldat noire pour les raisons suivantes :

• cette espèce est indigène à l’Amérique du Nord
• les mouches adultes sont faciles à manipuler (ne piquent et ne mordent pas)
•  les produits finaux ont une teneur élevée en protéines de qualité
• la mouche soldat noire se nourrit de déchets organiques qui, autrement, iraient encombrer les sites d’enfouissement.

De la larve au produit

Les stades de croissance varient d’une espèce à une autre d’insecte. Afin de permettre à la mouche soldat noire de croître de manière optimale, Bruce Jowett explique que l’entreprise a prévu une série de pièces à l’intérieur de la grange.

Le cycle de vie débute au moment de l’accouplement des mouches adultes, qui produira des œufs. Ces œufs sont d’abord conservés dans une salle d’éclosion jusqu’à ce que les larves en émergent, après quoi elles sont transportées vers d’autres zones, où elles sont récoltées avant la nymphose (le stade qui précède l’âge adulte).

La mouche soldat noire se nourrit de déchets organiques, plus précisément de sous-produits de la transformation alimentaire qui, autrement, seraient jetés. En fait, Bruce dit que les installations de Calgary détournent de la décharge 130 tonnes métriques de déchets alimentaires par jour.

Récolte et transformation

Après la récolte, les larves sont chauffées brièvement, puis pressées pour séparer l’huile des matières sèches (matières qui seront moulues en protéines en poudre) ou conservées entières. Alors que 98 pour cent des larves sont récoltées et transformées, deux pour cent sont réservées pour la reproduction.

L’huile et les protéines en poudre sont vendues en ce moment à des fabricants d’aliments pour animaux (plus précisément pour les animaux domestiques, les volailles, les porcs et les poissons). Les larves entières sont principalement destinées au marché des graines pour nourrir les oiseaux et les poules domestiques. Bruce et ses collègues poursuivent la recherche afin d’identifier comment leurs produits pourraient être utiles dans d’autres marchés et à d’autres industries, dont à la composition de produits cosmétiques.

L’élevage de la mouche soldat noire requiert que des conditions optimales soient maintenues en tout temps. Cette exigence, dit Bruce, est l’aspect le plus difficile de l’élevage de cette espèce, car les conditions optimales changent à chaque stade de son développement.

« La solution ne vient pas instantanément. Il faut beaucoup de recherche et de développement, et tirer des leçons de l’expérience passée », ajoute Bruce. « Nous nous concentrons sur une seule espèce, car nous tenons à bien faire les choses. »